Attentat de Nice : des réquisitions qui illustrent les fragilités du dossier

Le Parquet national antiterroriste a demandé, mardi 23 juin, le renvoi de neuf personnes devant les assises. Les charges contre cinq d’entre elles sont requalifiées en infraction de droit commun.

Par Elise Vincent Publié le 24 juin 2020 à 10h16 - Mis à jour le 24 juin 2020 à 11h26

Deux mois après la fin officielle des investigations, le Parquet national antiterroriste (PNAT) a rendu, mardi 23 juin, ses réquisitions, dans la vaste enquête sur l’attentat de Nice (86 morts, près de 500 blessés), survenu le 14 juillet 2016, sur la promenade des Anglais. Des réquisitions en demi-teintes, qui sont venues une nouvelle fois montrer la fragilité de la qualification terroriste de ce dossier considéré depuis le début comme problématique par les spécialistes.

Dans un communiqué diffusé mardi, le PNAT a ainsi demandé le renvoi de neuf personnes devant la cour d’assises de Paris spécialement composée. Mais parmi elles, cinq ont vu leurs charges requalifiées en simple infraction de droit commun, tandis que trois autres ont obtenu un non-lieu partiel et l’abandon des accusations de « complicité d’assassinats » et de « complicité de tentatives d’assassinats en bande organisée en relation avec une entreprise terroriste ». Une situation très particulière pour une affaire de terrorisme de cette ampleur.

Revendication tardive de l’EI

Le 14 juillet 2016, alors que le feu d’artifice de la fête nationale touchait à sa fin, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, un Tunisien de 31 ans au profil psychologique très tourmenté, avait pris le volant d’un camion de location. Il s’était ensuite engagé sur le front de mer niçois en forçant un barrage de police et en essayant de faire un maximum de victimes. Finalement abattu par les forces de l’ordre, il avait, en moins de quatre minutes, fauché et mutilé sur son passage un très grand nombre de familles avec enfants, ainsi que des touristes étrangers.

Deux jours après le drame, l’organisation Etat islamique (EI) avait revendiqué l’attaque. Mais alors que cette manifestation tardive interrogeait, la saisine du parquet antiterroriste, dirigé à l’époque par François Molins, avait peu fait débat. La France était en pleine vague d’attentats depuis 2015, tous pilotés de l’étranger ou le fait d’individus rentrés de Syrie. Or, au fil des investigations, les enquêteurs n’ont jamais pu étayer un quelconque lien matériel de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel avec l’EI. Ils ont seulement pu établir que l’assaillant regardait des vidéos de propagande de l’organisation terroriste.

Malgré ce lien ténu, le parquet a maintenu, mardi, dans ses réquisitions, la qualification « d’association de malfaiteurs terroriste criminelle » pour quatre des neuf mis en examen. Tous sont soupçonnés d’avoir aidé Mohamed Lahouaiej-Bouhlel à mener à bien son projet terroriste en connaissance de cause. Notamment en l’aidant à se procurer une arme. Parmi eux, des personnalités aussi diverses qu’un réceptionniste d’un hôtel niçois, un trafiquant d’armes albanais ou encore un homme qui vivait de petits boulots au noir. Les éléments à charge contre ces individus sont principalement liés à leur téléphonie.

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