Attentat de Nice : le parquet antiterroriste demande un procès aux assises pour neuf personnes

Ce procès, dans lequel la décision finale revient aux juges d’instruction antiterroriste, ne concerne pas l’auteur des faits, tué par la police le 14 juillet 2016.

Publié aujourd’hui à 10h10, mis à jour à 11h17

Le Parquet national antiterroriste (PNAT) a annoncé, mardi 23 juin, avoir demandé le renvoi de neuf personnes devant la cour d’assises de Paris, spécialement composée et compétente en matière de terrorisme, dans l’enquête sur l’attentat de Nice en 2016.

Le 14 juillet 2016, soir d’affluence et de feu d’artifice sur la promenade des Anglais, à Nice, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, un Tunisien de 31 ans, fauche, au volant d’un camion de location, 86 personnes – dont des enfants, des familles nombreuses et des touristes étrangers –, en quatre minutes, avant d’être abattu par les forces de l’ordre. Ce procès éventuel, dans lequel la décision finale revient désormais aux juges d’instruction antiterroriste, ne le concerne donc pas.

Le principal enjeu sera dès lors de savoir si les mis en cause avaient connaissance du projet macabre de l’assaillant. Or, tous contestent avoir été au courant, et l’enquête n’a pas apporté de preuve formelle du contraire.

Pour les trois principaux suspects, Mohamed G., Ramzi A. et Chokri C., le PNAT requiert l’abandon des poursuites pour « complicité d’assassinats » : il veut qu’ils soient seulement jugés, avec un quatrième, Hamdi Z., pour « association de malfaiteurs terroriste criminelle ».

Les magistrats instructeurs ont rassemblé des éléments établissant que les trois premiers étaient soit montés dans le camion de location, soit avaient été informés des projets de location, soit étaient concernés par un SMS et un message vocal de Lahouaiej-Bouhlel datant du soir de l’attaque évoquant une fourniture d’armes.

Mobile incertain

Le PNAT demande également le renvoi devant la cour d’assises spéciale de cinq autres suspects – Artan H., Enkeledja Z., Maksim C., Brahim T. et Endri E. –, pour la fourniture de l’arme à Mohamed Lahaoueij-Bouhlel. Quatre d’entre eux avaient été mis en examen pour des infractions terroristes, mais le parquet « considère qu’[ils] n’avaient pas connaissance de la destination de l’arme qu’il leur est reproché d’avoir fournie » à l’auteur de l’attentat. Selon le parquet, les faits doivent être requalifiés en droit commun les concernant.

Quatre suspects sont actuellement sous contrôle judiciaire, quatre autres sont en détention provisoire, tandis qu’un neuvième, Endri E., fait l’objet d’un mandat d’arrêt. Un dixième mis en cause s’est suicidé en prison.
Démarches multiples pour louer le camion, repérages sur la partie piétonne de la « Prom » afin de multiplier les victimes : les éléments de l’enquête, dont l’Agence France-Presse (AFP) a eu connaissance, étayent le caractère prémédité de l’attaque de la promenade des Anglais, mais son mobile reste incertain.

L’auteur avait, certes, manifesté des signes avant l’attentat, de religiosité, voire d’attrait pour l’islamisme radical. Mais Mohamed Lahouaiej-Bouhlel était inconnu des services de renseignement et les enquêteurs n’ont pas trouvé d’acte d’allégeance à l’organisation djihadiste Etat islamique, ni de preuve d’une quelconque implication du groupe.

« Le PNAT n’arrive pas à prendre ses responsabilités quand un non-lieu s’impose », ont déploré les avocats de Mohamed G., Mes William Bourdon et Vincent Brengarth, alors que l’enquête « a démontré de façon certaine l’absence totale de connaissance par notre client des intentions de Lahouaiej-Bouhlel ».

« C’est une étape dans un dossier complexe, mais c’est une étape cruciale. Le PNAT a procédé à une analyse au cas par cas du rôle de chacun des neuf mis en examen et c’est toujours le signe d’une bonne justice. Nous attendons désormais l’ordonnance finale des juges d’instruction et nous espérons un procès en 2021 », a réagi Me Eric Morain, avocat de la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accidents collectifs (Fenvac), la principale association de victimes.

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