Sauvée par le sacrifice du gendarme Arnaud Beltrame lors de l’attaque meurtrière du Super U de Trèbes en 2018, Julie, caissière prise en otage, n’a jamais pris la parole publiquement.
Elle a accepté de se confier ce jeudi face aux caméras du 20H de TF1.
"C’était un homme d’exception. Ce n’est pas juste que l’on perde une personne comme lui". Plus de cinq ans et demi après l’attentat de Trèbes (Aude), Julie, caissière prise en otage, reste bouleversée par le sacrifice d’Arnaud Beltrame, comme elle le confie auprès de TF1. Pour cette femme, qui n’avait jamais pris la parole publiquement, parler de ce gendarme érigé au rang de héros national est un devoir.
Le 23 mars 2018, cette hôtesse de caisse du Super U de Trèbes est à l’accueil du supermarché quand elle entend crier "Allah Akbar". Elle raconte la suite à TF1 : "J’ai vu quelqu’un qui tirait en l’air. Je me suis tout de suite baissée et iI est rentré dans le bureau. Il a dit ’tiens c’est bon j’ai mon otage, sors de là, je ne te ferai pas de mal’".
"Je sentais le canon de son arme trembler sur mon crâne"
Julie, caissière du Super U de Trèbes
L’assaillant, Radouane Lakdim, vient d’abattre deux personnes dans le magasin et lui dit vouloir mourir en martyr. Julie devient son bouclier humain, un pistolet sur la tête et un couteau sur la poitrine. "Je sentais le canon de son arme trembler sur mon crâne. Je sentais aussi que dans l’esprit du terroriste, je n’existais plus, je n’étais plus qu’une espèce de pantin. Alors pour exister encore en tant qu’individu, je lui ai dit ’attention tu trembles, ne me tue pas sans avoir fait exprès’". À ce moment-là, Julie n’a pas de doute : "Je pense vraiment mourir."
"C’était un homme d’exception"
Julie, caissière du Super U de Trèbes
C’est alors que le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, 44 ans, le plus haut gradé sur place, pénètre dans le magasin. "L’équipe d’intervention était à ma droite et j’ai entendu une voix sur ma gauche, un homme qui a dit bien fort ’vos gueules, reculez, je prends’", raconte Julie. Un échange entre le terroriste et ce gendarme s’ensuit. "J’entends que le gendarme choisit bien ses mots en répétant de diverses manières : ’Prends moi à la place de la petite dame qui n’y est pour rien, moi je représente l’État, on va discuter’". Arnaud Beltrame, qui vient donc de se proposer comme otage en échange de la libération de Julie, pose son arme et avance en direction de l’hôtesse de caisse. Elle ne le reverra plus jamais.
Julie est bouleversée par ce drame. Elle ne se remet pas de ce geste héroïque. Sa vie d’avant vole en éclat, jusqu’à une rencontre avec Marielle Beltrame, l’épouse d’Arnaud, qui l’aide à remonter la pente. "Elle m’a tendue la main la première en m’écrivant une très gentille et jolie lettre. Cela m’a aidé à avancer et à soigner un peu ma culpabilité", témoigne-t-elle. Le 10 janvier, Julie publiera son livre Sa vie pour la mienne, aux éditons Artège, à quelques jours du procès des attentats de Trèbes et Carcassonne. Le premier se tiendra devant la cour d’assises spéciale de Paris du 22 janvier au 23 février. Sept proches du meurtrier d’Arnaud Beltrame seront jugés, le djihadiste, qui s’était revendiqué de l’EI, ayant été abattu.
Cet article est rédigé par Julien Chabrout pour Tf1info.